“Nul ne peut être mathématicien s’il n’a l’âme d’un poète” (Sofia Kovalevskaya)
Homme de lettres et homme de sciences sont plus proches qu’on ne l’imaginerait. « Le monde est tellement plein de liens insoupçonnés ! » s’émerveille Cédric Villani. Cette conférence apporte un début de réponse à la question des « deux cultures » et des partages disciplinaires entre sciences et humanités. La réflexion proposée sur les mécanismes de la création amorce le questionnement sur les rapports entre abstraction et intuition: l’intuition est, pour Einstein, « la seule chose qui vaille au monde », la seule voie menant aux idées et aux découvertes.
Le parallèle entre la création du mathématicien et celle du poète est courant dans les écrits des mathématiciens dont certains sont aussi poètes. Et la thématique du rêve constitue un extraordinaire agent de liaison entre art, littérature, histoire, philosophie et découverte scientifique. Henri Poincaré souligne que le moi inconscient joue un rôle capital dans l’invention mathématique. Et la façon dont il relate la rédaction de son mémoire rappelle curieusement le récit de la composition quasiment en écriture automatique du premier roman gothique par Horace Walpole (1717-1797). Car on ne dira jamais assez l’importance vitale du rêve dans la vie et dans la création humaines: « la vraie réalité n’est que dans les rêves » (Baudelaire, Les Paradis Artificiels 1860).
Elizabeth Durot-Boucé est Professeur de Langue et Littérature anglaises à l’Université Le Havre-Normandie. Son domaine de recherche englobe l’histoire des idées, la littérature et la traduction. Spécialiste du Siècle des Lumières, elle vient de publier L’Autre Voix/e : Horace Walpole, l’Arlequin de Strawberry Hill (2020) et Curios (2021).